par Hervé Brival
DUCOS, Martinique (AP) -- Enfants et petits-enfants, tous s'étaient pressés à l'aéroport de Fort-de-France pour souhaiter bon voyage au couple Berisson qui célébrait ses 50 ans de mariage. Quand ils sont revenus mardi à l'aéroport du Lamentin, une immense vague de douleur a effacé la perspective des retrouvailles à l'annonce de la catastrophe aérienne.
Paul Berisson, 79 ans, et son épouse George, 70 ans, qui avaient fait le voyage pour leurs noces d'or avec une trentaine d'amis, comptaient au nombre des 160 occupants de l'appareil de la compagnie colombienne West Caribbean Airways, qui s'est écrasé dans une zone boisée de l'ouest du Venezuela alors qu'il regagnait la Martinique en provenance du Panama.
Aucun des huit membres d'équipage colombiens et des 152 passagers -dont un enfant de 21 mois- originaires du département d'outre-mer n'a survécu à l'accident. La nouvelle, accueillie dans l'angoisse puis par des larmes et des cris, s'est accompagnée d'une onde de choc dans l'île de la Martinique, où beaucoup d'habitants comptaient des proches ou des amis parmi les victimes.
«Ce qui nous console, c'est qu'ils ont été ensemble jusqu'à la fin», a confié Giselle Berisson, 45 ans, fille du couple de septuagénaires disparus dans le crash. «Le jour de leur départ, toute la famille était ici pour leur dire au revoir... Nous avions fait un repas de famille pour se dire au revoir. Cela nous console aussi».
La Martinique, distante de 7.000km de la métropole et forte de quelque 432.000 habitants, «est un petit endroit. Alors 152 morts, vous imaginez», souligne Magali Audrain-Grivalliers, chargée de communication à la préfecture. «Cela veut dire que de façon virtuelle, chacun avait un cousin dans cet avion».
A l'aéroport du Lamentin, les parents des passagers se sont effondrés en sanglots à l'écoute de la liste de leurs proches décédés, lue à haute voix. «L'aéroport était un cauchemar en lui-même, avec toutes ces familles qui attendaient des nouvelles. Certains savaient et partaient en larmes», raconte Georges Venkapaten, dont le frère de 48 ans est mort en compagnie de sa femme et de son fils âgé de six ans. «C'est encore dur à croire», «mon frère et toute sa famille sont partis», ajoute-t-il.
M. Venkapaten a fait partie des nombreuses personnes réconfortées mercredi par le ministre de l'Outre-Mer François Baroin à l'issue de la cérémonie oecuménique organisée à l'aéroport du Lamentin.
Parmi les proches des victimes, des enfants dont les parents étaient partis en vacances au Panama sont devenus orphelins en l'espace d'une nuit. «Ils demandaient: 'Qu'est-ce qui va nous arriver? Qu'est-ce que nous allons faire?' Ce sont des questions qui vous donnent la chair de poule», a témoigné sur la radio RCI Max Bottius, l'un des psychologues envoyés à l'aéroport pour soutenir les familles. Dans la proche localité de Ducos, qui aurait perdu une trentaine de ses habitants dans le crash du MD-82, quelque 150 amis et proches se sont réunis devant la mairie. «Je ne comprends pas. C'est comme si le ciel m'était tombé sur la tête aujourd'hui», confie sous le choc Claire Renette, 40 ans, dont la soeur est morte dans l'accident.
A son arrivée en Martinique en provenance de Paris, M. Baroin a souligné que la «priorité» était «l'information donnée aux familles». «La première décision à prendre, c'est d'abord de bien s'assurer que toutes les familles souffrent le moins possible», a dit le ministre. «Il faut qu'ils sachent qu'on est là, qu'ils ne sont pas seuls dans leur douleur», a-t-il ajouté après avoir rencontré les membres de la cellule de crise installée à l'aéroport.
Souhaitant que «chacun dispose du même niveau d'information» concernant l'enquête sur l'accident, il a déclaré qu'il «fallait voir de quelle manière on peut rapatrier les corps, sachant qu'on ne peut pas les rapatrier tant qu'ils n'ont pas été identifiés».
Après la cérémonie oecuménique à l'aéroport, M. Baroin devait se rendre à Ducos et dans d'autres localités endeuillées comme Saint-Esprit, Le François et Basse-Pointe, dont 16 concitoyens sont morts. AP
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